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Politique de la FED : explication d’un échec

par Dominique Mercier
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Cela fait maintenant plus de 8 ans que la crise des subprimes est survenue et l’on dit aujourd’hui que la croissance repart aux Etats-Unis. Pourtant celle-ci ne dépasse toujours pas les 2%, et il faut se souvenir des taux antérieurs de croissance outre-Atlantique, atteignant en moyenne 3,5% sur toute la deuxième moitié du 20ème siècle. Comment expliquer un tel ralentissement, alors même que les Etats-Unis ont mené une politique monétaire sans précédent?

Pour certains observateurs, le faible résultat de la politique monétaire expansionniste de la FED est une énigme. Pourtant l’explication de son échec à relancer la croissance américaine est fort simple. Cette politique n’a pas marché car elle revient à grandement méconnaitre les moteurs économiques de la croissance… Il s’agit notamment de la méconnaissance du rôle des jeunes entreprises, qui n’ont pas pu profiter des liquidités des banques en raison du risque inhérent à leur âge, mais qui – comme l’a démontré la Kauffman Foundation[[Jason Wiens et Chris Jackson, The Importance of Young Firms for Economic Growth, Kauffman Foundation, 13 septembre 2015. (http://www.kauffman.org/ /media/kauffman_org/resources/2014/entrepreneurship%20policy%20digest/september%202014/entrepreneurship_policy_digest_september2014.pdf)]] – sont en fait celles qui créent le plus d’emplois et augmentent la productivité dans un pays.

Sur les vingt-cinq dernières années en effet, pratiquement l’intégralité des nouveaux emplois privés créés aux Etats-Unis l’ont été par des entreprises de moins de cinq ans. Ceci d’ailleurs n’est pas le fait exclusif des Etats-Unis, mais est valable dans tous les pays étudiés, ainsi que le montre une étude de l’OCDE (qui se focalise sur les jeunes entreprises de moins de 500 salariés) :

« Les jeunes PME sont la première source de création d’emplois sur la dernière décennie et parmi les 18 pays analysés. Même si elles ont un faible poids dans l’économie – elles représentent en moyenne seulement 17% de l’emploi – elles contribuent pour plus du double de leur poids à la création d’emploi (42% du total) et à seulement 22% de la destruction d’emploi totale, ce qui en fait des créatrices nettes d’emplois.»[[Comme l’atteste cette même étude, on constate cependant que dans tous les pays, la part des start-up a diminué sur la dernière décennie, en phase avec le ralentissement entrepreneurial que l’on constate aux Etats-Unis depuis 30 ans.]]

Par ailleurs, non seulement les jeunes entreprises sont la principale source de création d’emplois mais elles contribuent fortement au dynamisme économique en introduisant de la concurrence dans les marchés et en stimulant l’innovation. Comme l’explique un chercheur de la Kauffman Foundation, elles sont dans une dynamique « up or out », c’est-à-dire que, soit elles croissent rapidement et sont source d’emplois, soit elles échouent tout aussi rapidement et quittent le marché, permettant une allocation du capital là où il est le plus productif.

Cette explication est confirmée par d’autres mesures, comme l’atteste cet extrait d’un rapport[[Chicago Fed Letter de septembre 2014 : What is the economic impact of the slowdown in new business formation.]] de la Réserve Fédérale de Chicago :

« Des mesures soigneuses révèlent que la plupart des gains de productivité dans une économie surviennent lorsque les vieilles entreprises sont remplacées par de nouvelles. Pour cette raison, les nouveaux établissements et les ouvertures d’entreprises, quoique moins débattus que l’emploi ou le PIB, sont un indicateur fondamental pour évaluer la santé économique d’un pays. »

Ainsi, la faible réussite de la politique monétaire expansionniste de la FED s’explique facilement. Etant donné qu’une entreprise sur deux meure dans les 5 ans de sa création, les start-up qui créent la croissance n’ont pas accès aux emprunts bancaires, elles n’ont donc pas profité du quantitative easing. Ceci alors même que ce sont elles qui ont la plus forte propension à créer de l’emploi et à innover.

En matière d’investissement, nous ne connaissons pas les chiffres des montants investis par les jeunes entreprises. Ce que l’on sait cependant, c’est que les deux tiers de l’investissement américain sont réalisés par des entreprises non cotées. Ces entreprises, qui représentent environ la moitié de la production et de l’emploi américain, investissent en effet en moyenne 7,5% de leurs actifs contre seulement 4,1% pour les entreprises cotées. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le moteur de l’investissement n’est donc pas dans les grandes entreprises établies, mais dans des entreprises moins connues et qui souvent sont de tailles plus petites.

L’essentiel de l’investissement est donc réalisé par des entreprises qui ne sont pas des entreprises arrosables par la FED mais par celles qui investissent à leurs propres risques. Les entreprises cotées préfèrent quant à elles utiliser leurs marges pour racheter leurs propres actions : cela fait monter le cours de bourse et permet aux dirigeants ayant des stocks option de faire de belles plus-values.

La politique de la FED a donc tapé en dehors des ressorts véritables de la croissance, favorisant l’investissement là où il n’est pas ou peu productif, créant des bulles sur les entreprises cotées mais en n’arrosant pas les entreprises qui innovent, investissent et embauchent.

 

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1 commenter

HAMON mai 28, 2016 - 11:25 am

contradiction?
bien souvent vous nous avez vanté les modes de financement des start up américaines qui en raison de dispositifs fiscaux attractifs drainaient des milliards de dollars en leur faveur et facilitaient ainsi leurs besoin de financement : avaient -elles vraiment besoin d'un financement bancaire complémentaire important?????
comme le dirait ellkabash… répondez!!!!!

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