Les hommes politiques ne cessent de réclamer davantage d’innovation et de nouvelles technologies en France, afin de mieux nous défendre dans la concurrence internationale et donc stimuler l’emploi en France. Cependant, si l’on regarde les créations d’emplois dans les technologies de l’information par exemple, celles-ci sont très faibles au regard du total d’emplois créés...
On parle souvent de l’informatisation comme de la « troisième révolution » industrielle, et il existe même un nouveau domaine de l’économie, nommé « iconomie » qui étudie spécifiquement ses différentes conséquences[1]. Pourtant, en réalité, si l’on examine de près le secteur des techniques de l’information et de la communication - communément appelées nouvelles technologies - on constate qu’il ne représente que très peu du total des emplois, c’est-à-dire entre 2% et 5% du total dans les pays développés. Surtout, cette proportion risque de peu évoluer dans l’avenir.
D’après le dernier rapport de France Stratégie[2], si l’on regarde les métiers qui offriraient le plus de créations nettes d’emplois entre 2012 et 2022, on constate en effet que les technologies de l’information sont loin d’en être le principal pourvoyeur. Sur les 1,5 million d’emplois qui seront créés d’ici 2022, seuls 90.000 postes d’ingénieurs en informatique et télécommunications seront créés. Par comparaison, si l’on regroupe par secteur, ce sont au global 280.000 emplois qui seront créés dans le commerce ou la vente[3], 250.000 dans le paramédical[4], 200.000 pour l’aide à la personne[5], et 180.000 dans le secteur comptable et administratif[6], etc.
Ce constat est le même si l’on regarde les projections américaines du Bureau of Labor Statistics ; Ainsi, sur les 16 millions d’emplois nets qui seront créés aux États-Unis entre 2012 et 2022, seuls 140.000 seront créés dans le domaine du développement des logiciels et des applications[7].
Si les nouvelles technologies peuvent avoir un effet sur l’emploi, cet effet est donc pour l’essentiel indirect. C’est ce que confirme également une autre américaine[8], expliquant que les entreprises productrices de nouvelles technologies ne créent pas beaucoup d’emplois, mais que les entreprises qui utilisent massivement les technologies de l’information connaissent quant à elles des croissances en emplois plus fortes que les autres.
Cette étude révèle qu’aux États-Unis « les petites entreprises ayant massivement recours aux technologies de l’information représentent seulement 5% de l’emploi » mais que « la création nette d’emplois parmi ces petites entreprise a représenté entre 13 et 68% de la variation nette d’emplois de 2001 à 2009 ». Les nouvelles technologies semblent donc être un propulseur pour les petites entreprises afin d’exercer leur métier de base.
Ces différentes données ne nous disent pas si oui ou non le progrès technologique est aujourd’hui au global créateur ou destructeur d’emplois. Cette opération semble difficile même aux économistes chevronnés puisqu’il s’agit d’isoler l’effet de l’innovation sur l’emploi alors que beaucoup d’autres facteurs peuvent l’influencer (politiques économiques, mondialisation, etc.). En revanche, ce que ces chiffres nous confirment, c’est que l’État ne doit pas tant s’occuper de faire émerger les technologies de demain que de permettre un écosystème favorable encourageant l’ensemble des entreprises et des start-up.