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Le CDI mérite-il un piédestal ?

par Hervé Gourio
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Souvent les commentaires dans les médias sur les opérations de réduction d’effectifs dans les entreprises privées, relèvent d’une vision théâtrale de leur déroulement et de leurs effets réels. Le CDI mérite-il un tel piédestal ?

Cette théâtralisation se retrouve à propos des annonces de projets de rupture conventionnelle collective (RCC) par quelques groupes importants. Et nous voilà repartis sur des déclarations enflammées destinées, entre autres, à trancher de cette question si cruciale : Emmanuel Macron est-il de gauche ou de droite ? Le seul fait de poser la question à ce propos contient la réponse : oui aux yeux de la gauche il faut qu’Emmanuel Macron soit de droite. Bravo pour la perte de temps !

Pourtant la plupart des entrepreneurs et des syndicalistes n’ont que faire de théâtralisation. Ils ont déjà adopté conjointement la rupture conventionnelle individuelle depuis sept ans, fruit d’une intuition brillante de Laurence Parisot et de Marcel Grignard de la CFDT. Les départs négociés en 2017 grâce à cette réforme dépasseraient les 400.000. Le chiffre des plans de départs volontaires mis en place pendant la crise devrait lui être ajouté. Mais les statistiques de la DARES embourbent la question en ne les distinguant pas des plans de sauvegarde de l’emploi. Conclusion pratique : on peut réduire les effectifs avec le consentement des salariés sans passer par la dramaturgie des plans sociaux conflictuels. Au total ces conflits durs ont à coup sûr concerné beaucoup moins de personnes que les départs consentis.

On ne porte donc pas assez loin l’analyse et l’on ne parle pas assez de cette réalité. Elle devrait nous faire changer le regard collectif sur le CDI dans sa formulation actuelle. En effet les salariés qui acceptent une rupture conventionnelle ou un départ volontaire renoncent bel et bien à des CDI alors que tout un chacun le considère comme un avantage social de tout premier plan. C’est qu’on oublie de voir la contrepartie perverse de ce contrat si valorisé. Beaucoup de salariés y tiennent si fort qu’ils restent dans des postes de travail qui ne leur conviennent pas et où ils ne conviennent pas non plus à leur employeur. Trivialement, ils font mal un travail qui les ennuie. Les risques juridiques pour l’employeur et la mollesse de la création d’emplois s’allient pour provoquer une collusion fatale à l’amélioration des performances des salariés. Mettre fin à ce blocage grâce à la rupture conventionnelle collective est un changement riche de promesses, à la fois pour des salariés mal dans leur peau et pour des entrepreneurs jusqu’ici intimidés par les procédures.

Les plans de départs volontaires ont été souvent bien acceptés mais marquaient le pas car ils ne permettaient pas de négocier quels salariés on souhaitait faire partir, en fonction des intérêts de l’entreprise. Utiles dans des phases initiales de réduction d’effectifs, ils l’étaient moins quand les plus dynamiques étaient partis et qu’il était difficile d’ajuster les propositions aux salariés dont pourtant le départ était le plus bénéfique. Il est moins utile aussi pour ces derniers car définir des évolutions positives sur mesure n’est pas très aisé pour des catégories en surnombre.

Tout n’est évidemment pas mauvais dans le CDI. Sa vertu la moins célébrée est l’attachement au succès à long terme qu’il génère chez des salariés, souvent plus impactés personnellement par les difficultés de l’entreprise, que ne le sont les actionnaires volatiles des grandes sociétés aujourd’hui.
Flexibiliser à outrance le CDI n’est certainement pas souhaitable, car il rendrait incertaine la présence des salariés, et porterait atteinte à l’attachement des salariés au succès de leur entreprise. Mais on est bien éloigné de ce risque quand on impose la négociation des ruptures conventionnelles collectives !
Il reste le point clé : faire descendre le CDI du piédestal idéologique où beaucoup le représentent aujourd’hui. Le CDI est avant tout un point de rencontre possible, mais pas garanti, du succès de l’entreprise et du bien-être des salariés.

 

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