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La première bataille de l’ISF-PME

par Bernard Zimmern
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Au cours de l’été 2004, nous n’entendons parler de rien.
Malgré l’échec de nos efforts pour rencontrer le Ministre lui-même, nous apprenons par les médias qu’il a proposé notre mesure à J.P. Raffarin, Premier ministre, au cours du mois d’août, mais s’est fait renvoyer, puis qu’il en a parlé à J. Chirac, mais sans plus de succès.
Nous apprendrons, mais plus tard, que le directeur adjoint de la DLF, Jean-Pierre Lieb, également inspecteur des finances, assisté d’un administrateur civil de l’INSEE, Daniel Turquety, ont tout fait pour convaincre le cabinet de Nicolas Sarkozy du mal fondé de notre note. Une recherche sur Daniel Turquety nous montre qu’il a été un soutien de la CGT dans ses luttes pour les grèves chez Renault.

Mais cela n’empêche pas notre proposition d’avancer. Au cours de la discussion du projet du budget 2005, le PLF 2005, le Ministre propose au groupe UMP à l’Assemblée nationale, d’introduire cette disposition. Et comme il est trop tard pour le faire à l’Assemblée, on la fera passer au Sénat qui n’a pas encore abordé la discussion du budget.

Sur la proposition du rapporteur général du budget, le sénateur Philippe Marini, la commission des Finances du Sénat vote mi-novembre 2004 la première mesure ISF-emploi : elle va moins loin que ce que nous avions proposé puisqu’au lieu de la moitié de l’investissement, ce serait le quart, et que la déduction serait plafonnée à 50.000 euros.
C’est dommage car nous pouvions espérer retenir ou faire revenir tous les entrepreneurs dont la France a besoin et qui sont partis à Bruxelles pour cause d’ISF. Mais c’est un premier pas. Cela devrait créer une bonne dizaine de milliers d’investisseurs dans les entreprises de plus et faire passer les sommes investies dans les gazelles de 1,5 à 5 milliards d’euros.
Il ne reste plus qu’à faire voter la mesure par le Sénat puis à l’incorporer dans le texte d’harmonisation avec l’Assemblée nationale.

C’était compter sans Jacques Chirac.
Trois jours avant le vote par le Sénat, en séance plénière, sur le texte voté par la commission des finances, coup de téléphone du fonctionnaire de Bercy chargé de suivre la mesure : Chirac lui-même a ordonné son retrait et son remplacement par une mesure absolument sans aucun intérêt puisque la déduction est limitée à 2.000 euros et assortie de conditions telles (la société doit investir un minimum dans des recherches etc.) que tout investisseur sera dégoûté.

La seule information qu’apporte la rédaction proposée par le sénateur Gournac le lundi suivant est que cette version a été concoctée par la DLF, car il est impossible de faire plus compliqué, et particulièrement par le sous-directeur, J.P. Lieb qui, nous le savons, est de gauche et veille jalousement sur l’ISF.

Il sera d’ailleurs là, à la séance du Sénat, le 24 novembre 2004, à côté du secrétaire d’État au budget, Dominique Bussereau, qui suit au doigt et à la lettre les instructions que lui donne Lieb – car c’est bien l’Administration qui dicte au Ministre ce qu’il doit faire -, qui nous regarde d’un air goguenard dans les tribunes du Sénat où nous sommes assis.

Nous découvrons alors l’un des aspects les plus importants mais les moins connus des rapports entre le Parlement et l’administration : la totale inféodation du Parlement aux décisions prises par la haute administration de Bercy.

Pourquoi Chirac s’est-il dressé contre cette mesure ? Il avait pourtant dit à un député qui nous l’a répété : « pour toutes les mesures d’allègement d’ISF proposées par les députés [notamment l’exemption de la résidence principale qui commence à y faire tomber de nombreux ménages modestes et les fonctionnaires à cause de l’envol de l’immobilier] vous pouvez vous tirer une balle dans le pied. Mais j’approuve l’ISF pour les PME car cela crée des emplois ».

Pourquoi ce revirement ? L’explication la plus vraisemblable est que nous sommes alors dans la période TSS, Tout Sauf Sarkozy, et qu’il a suffi que cette mesure ISF-emploi soit reprise par ce dernier pour la rendre immédiatement anathème à Chirac et le pousse à marquer que ce n’est pas Sarkozy qui dirige le Parlement, c’est lui.

Ce sont très vraisemblablement des considérations politiques aussi mesquines qui ont retardé de plusieurs années le vote de la seule mesure capable de relancer une croissance forte de l’emploi.

 

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