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La convergence avec l’Allemagne, une exigence pour redresser la France

par Alain Mathieu
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Pour limiter les dépenses publiques et favoriser la croissance, il faut s’inspirer du modèle de notre concurrent le plus proche : l’Allemagne.

-> Article initialement publié dans Valeurs Actuelles du 27 juin.

Dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a donné la priorité à « l’accélération écologique », c’est-à-dire l’éolien en mer et la chasse aux boites et sacs en plastique, l’inscription de la lutte contre le changement climatique dans la Constitution, la « police de l’alimentation » ; les indemnités chômage pour les démissionnaires ; le Pass culture de 500 € pour les jeunes ; le service national universel, etc. Des dépenses publiques supplémentaires ! Et pas d’économie en vue !
Certes le « combat central » d’Edouard Philippe est de « permettre à tous de travailler ». Mais il ignore les termes : compétitivité, exportation, entreprise, concurrence, charges sur les entreprises, comparaisons internationales. Son univers est limité à la politique et à l’administration française.

Pour élargir cet horizon, comparons la France à son principal concurrent : l’Allemagne.

Dans la machine-outil et la chimie, les Allemands ont balayé les Français. Mais dans les produits de luxe, le pétrole, la banque, les Français dépassent les Allemands. Dans des secteurs très présents à l’étranger comme les travaux publics, l’hôtellerie, la restauration collective, la distribution d’eau, l’assainissement, la publicité, le conseil, les services rendus à l’étranger sont fournis principalement par une main-d’œuvre recrutée localement. Les charges y sont donc locales et les entreprises françaises dominent les allemandes.

En revanche quand la production se situe en France la concurrence est souvent allemande et le prix de revient, donc les impôts et les charges sociales, est déterminant. Pour la Cour des comptes et le ministère des Finances, les charges fiscales et sociales des entreprises françaises représente 9 % du PIB national de plus que pour les entreprises allemandes.

D’où l’insuffisante compétitivité française, le solde de notre commerce extérieur (-2% du PIB contre + 7,5%), la proportion de personnes d’âge actif ayant un emploi (66% contre 76%), le taux de chômage (8,8% contre 3,2%), le déficit des finances publiques (-3% du PIB contre +3 %), la dette publique (99% du PIB contre 60%), un niveau de vie moyen inférieur de + de 15%.

Avant 2005, la France avait un taux de chômage inférieur à l’Allemagne. De 1960 à 2005 en 45 ans, la croissance française n’a été inférieure à l’allemande qu’un an sur cinq. L’économie française n’est pas intrinsèquement inférieure.

Sans doute la comparaison est-elle difficile, car la population allemande décroît, chaque femme allemande donnant le jour à 1,6 enfant contre 1,9 pour la française. Les dépenses d’enseignement et les allocations familiales y sont donc moins élevées. Du fait du taux de chômage inférieur les femmes y travaillent plus souvent à temps partiel choisi.

L’âge légal de départ à la retraite est en Allemagne de 65 ans et 7 mois. Il passera à 67 ans dans 10 ans. L’âge réel moyen de départ à la retraite est supérieur de trois ans à la France. Les Allemands n’ont pas de régimes spéciaux de retraite et 40% d’entre eux choisissent une retraite par capitalisation. Ils ne connaissent pas la semaine de 35 heures. La plupart de leurs fonctionnaires travaillent 40 heures par semaine, leurs enseignants sont présents à temps plein dans leur école (43 heures dans le secondaire). Sur une vie entière, le temps de travail des fonctionnaires français est inférieur de 30% à celui des fonctionnaires allemands.

L’Allemagne est un état fédéral. Les collectivités locales y ont des compétences exclusives pour l’éducation, la police, la santé, la culture, le sport. Les actes médicaux y sont remboursés dans le privé au même tarif que dans le public.
Une partie des hôpitaux et la moitié des HLM allemands ont été privatisés. En revanche la part des écoles publiques y est plus forte, les autoroutes y sont publiques, comme la distribution d’eau et l’assainissement et la plupart des maisons de retraite.

Les Allemands ont 55 impôts contre près de 400 en France. Les impôts perçus sur les entreprises par les collectivités locales y sont assis sur les bénéfices. Les intérêts des élus locaux sont donc proches de ceux des entreprises. Les Allemands n’aiment pas la dette, Schuld, en allemand, mot qui se traduit aussi par « faute ». Pour eux un petit job vaut mieux que pas de job. Les entreprises exportatrices y ayant un poids plus important, l’opinion publique y est donc plus favorable au libre-échange.
En Allemagne il n’y a pas de taxe professionnelle (CVAE et CFE), de taxe d’apprentissage, de taxe sur les salaires, et les taux de la taxe foncière et de l’impôt sur les bénéfices sont inférieurs. La Cour des comptes a estimé à 3% du PIB la différence d’impôts sur les entreprises.

Les charges sociales patronales françaises pour la formation, le logement, les transports, les allocations familiales n’existent pas en Allemagne. Les charges sociales patronales pour l’assurance-maladie, la retraite, l’assurance chômage y sont inférieures. Pour un salaire moyen ces charges en France sont le double des mêmes en Allemagne. Les bas salaires français ont des charges réduites, si bien que les créations d’emploi se font dans le bâtiment la restauration l’hôtellerie les entrepôts d’Amazon, etc. Au total les cotisations sociales patronales françaises restent supérieures de 6% du PIB par rapport à celles de l’Allemagne.

Pour diminuer leurs charges sur les entreprises, les Allemands ont réduit leurs dépenses publiques, inférieures de 12,6% du PIB aux françaises. Les différences sont d’abord dans la rémunération des fonctionnaires (5,6% du PIB) et les retraites (4%) puis viennent les intérêts de la dette (0,8% du PIB), le logement (0,8%), la défense (0,9%), la famille (0,7%) et l’indemnisation du chômage (0,3%).

La France a environ 7 millions de fonctionnaires (en incluant le personnel des universités, de Pôle emploi, de la sécurité sociale, etc.) alors que l’Allemagne n’en a que 4,6 millions. Pour être à égalité par rapport au chiffre de la population nous devrions en avoir 3,6 millions. Il faudrait pour cela aligner les horaires et les retraites de nos fonctionnaires sur ceux des Allemands et ainsi réduire les effectifs. D’après l’INSEE la France embauche environ 400.000 fonctionnaires par an. Un gel des embauches pendant plusieurs années, comme l’on fait les Britanniques et les Italiens, permettrait le rapprochement. La méthode italienne était politiquement habile : le gel n’était pas total, les exceptions étant autorisées par un ministre spécial.

En l’absence de convergence, l’écart se creuserait. L’€uro serait menacé et l’Europe pourrait se séparer en deux, entre un Nord prospère et un Sud déclinant.
Nos dirigeants politiques connaissent les réformes qui ont réussi en Allemagne et dans six autres pays développés qui ont baissé leurs dépenses publiques de 10% de leur PIB. Il suffirait d’imiter l’Allemagne. Si les Français savaient que la convergence avec l’Allemagne est non seulement nécessaire mais possible, ils accepteraient ces réformes. Alors leurs dirigeants pourraient les décider car leur « combat central » serait devenu la convergence franco-allemande.

 

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1 commenter

zelectron juillet 3, 2019 - 5:51 pm

Mais surtout pas de création de richesses . . .
et encore moins celles qu’on nomme les richesses-source ; manufactures, agricultures-élevages, artisanats (en dehors de l’art) . . . (ironie) accueillons à bras ouverts les « vrais créateurs de richesses : les marchands du temple et autres financiers de tous poils, les négociants, importateurs, distributeurs, les fonctionnaires, les hommes politiques , bref tous ceux qui ne produisent rien !

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