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L’espace-temps économique

par Bernard Biedermann
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Par cette analyse, je suggère une vision alternative aux théories classiques de la logique des flux de prévisions qui agissent en permanence sur la conjoncture économique. Cette approche se justifie par le fonctionnement du système économique actuel bien différent des modèles néoclassiques et keynésiens.

Le système économique actuel fonctionne sur la base de nouvelles caractéristiques :
– Un haut niveau de complexité à toutes les étapes de l’entreprise, innovation, conception, caractéristiques et fonctionnalités des produits et services, fabrication, logistique, stratégie vente, sécurité, Services Après-Vente, …
– Une mondialisation systématique qui s’accompagne de possibilités immenses, de contraintes culturelles et juridiques inattendues, de surprises, et bien entendu, de fortes dépendances à risque et d’incertitudes à gérer dans un contexte qui impose des prises de décisions rapides.
– Un immense environnement de flux d’informations permanents et nécessaires à toutes les étapes de la production et de la consommation.
– Une numérisation omniprésente, obligatoire, souvent complexe, par laquelle le travailleur, le consommateur, le citoyen, les objets, n’exercent leurs activités qu’en n’utilisant des données.

Dans ce nouvel environnement, les comportements des entreprises et des consommateurs, dans la réalité, et en tant qu’hypothèse de base des théories, doivent être révisés en intégrant la vision de l’ochlonomie qui permet aux entreprises, aux institutions, aux consommateurs et à l’État de tirer pleinement parti du système technique fondé sur l’informatique, l’internet et l’intelligence partagée. Les activités de prévisions sont de plus en plus, nécessaires et difficiles.

L’immense fichier des prévisions

Pour une nouvelle conception des prévisions économiques imaginons alors un immense fichier à plusieurs dimensions : les valeurs économiques, le temps, les marges d’erreurs, les évènements et tendances non économiques. Il faut imaginer un immense projecteur qui projette, en permanence dans le futur, une vidéo de l’économie réelle plus ou moins déformée, avec des images plus ou moins floues …
– Le temps avec pour unités : les jours, les semaines, les mois, les années, au fur et à mesure que l’on s’éloigne de l’instant T du présent.
– Pour toutes les variables économiques prévues, les marges d’erreur augmentent avec le temps.
– Les prévisions s’appliquant aux quantités, aux prix, aux revenus, aux taux d’intérêts, à toutes les variables économiques susceptibles d’influencer les décisions et anticipations prises au présent.
– Les modèles de prévisions anticipent également le comportement de maximisation du profit au moment du processus de décision.
– Une dimension qui comprend les anticipations d’influences issues d’autres domaines comme la sociologie, la démographie, la conjoncture politique, les conflits locaux ou internationaux, les annonces d’innovations, les contraintes de type climatique, …Chacune de ces influences est associée à une estimation psychologique de probabilité qui elle aussi augmente lorsque l’on se rapproche du temps présent.
– Des conditions de dépendances associées à un niveau de risque.
– Les prévisions sont produites par les entreprises, les salariés, les rentiers, les retraités, les consommateurs, les ministères, les instituts de conjoncture, … Il s’agit de dossiers, qui figurent sur une page, dans un volume, ou dans la mémoire du petit salarié qui consacre quelques minutes par an à planifier ses grosses dépenses comme celles des vacances en tenant compte de changements potentiels très importants. Le jeune ingénieur, qui se lance dans une start-up pour lancer un produit innovant n’a pas forcément produit un business-plan mais son banquier y a réfléchi. Pratiquement tout acteur économique fait des prévisions.
– L’entreprise comme le consommateur, ont besoin d’estimer les avantages qu’ils obtiennent de leurs prévisions, et qui peuvent avoir un coût (temps passé, recherches et achats d’informations, report de décisions, …)
– Les prévisions se construisent essentiellement sur des résultats passés, ce qui est le plus simple, mais aussi grâce aux flux continus d’informations économiques diffusés par les médias. Elles sont réalisées sur les quantités et les prix des produits ayant une certaine importance dans le CA et d’autant plus que leurs fluctuations sont élevées. Dans le cas d’innovations, sans résultats passés, les réflexions sont plus ouvertes, aisées lorsqu’il s’agit de substitutions, mais intuitives lorsque le produit ou service répond à un nouveau besoin.
– Le temps passé sur les dossiers de prévisions et d’anticipations est fonction des écarts entre les résultats et leurs prévisions, de changements structurels, ou d’évènements d’influence inattendus.
– Lorsque les prévisions sont difficiles à produire, les instituts de conjoncture ont tendance à interroger des entreprises sur leurs anticipations.
– Même pour des métiers identiques, le choix de la méthode de prévision peut être différent et relève des profils psychologiques. Les équipes travaillent souvent de manière conjointe sur des prévisions basées sur les résultats passés et sur des anticipations de fonctionnement du marché.
– La méthode d’élaboration des prévisions change en fonction des termes, du type de produit et de sa localisation de production et de vente.
– De manière continue il y a des mises à jour des prévisions basées sur les derniers résultats, sur les publications des instituts, et sur les nouveaux faits et tendances exogènes qui contribuent à l’environnement de l’économique avec surprises (guerres, météo, phénomènes sociologiques, …). La mise à jour d’une prévision peut également impacter d’autres prévisions faites par les concurrents, un peu comme le phénomène d’intrication en physique quantique. Ce sont donc les versions de prévisions les plus récentes qui influencent les décisions prises au présent, avec ou sans délais, puis les dernières prises de décisions provoquent des nouvelles mises à jour des prévisions.
– Les flux d’informations économiques contemporains contribuent à diminuer la complexité perçue ainsi que l’incertitude de l’époque de Keynes car les informations constituent la base de réflexions complémentaires qui conduisent à plus de convictions grâce à la recherche de nouveaux repères et à la construction d’autre scénarios. Dans les process de décisions, la tendance consiste souvent à faire plus confiance à ceux qui ont des convictions qu’à ceux qui vivent dans l’incertitude.
– Les prévisions sont d’autant plus nécessaires que les chiffres réels résultent de décisions du marketing et de moins en moins de l’offre et de la demande qui normalement devrait s’imposer. Elles le sont également pour s’adapter aux contraintes économiques contemporaines comme la complexité, le changement et l’innovation continus, la globalisation, …
– En général, les prévisions sont plus linéaires que les résultats réels. Le caractère linéaire des prévisions contribue souvent à la stabilité de la conjoncture. Elles sont également moins corrélées entre elles que dans la réalité.
– Il y a des réactions de comportement en fonction de la conformité des résultats aux prévisions : confiance en soi et nouvelles réflexions sur la méthode.

Par rapport aux théories des anticipations rationnelles

Initialement, les anticipations rationnelles avaient été conçues pour intégrer la notion de temps dans les modèles de type walrassiens. Les agents économiques font des anticipations en utilisant toutes les informations nécessaires de manière optimale ce qui se traduit, dans un modèle bien conforme aux conditions du marché, par des résultats égaux aux anticipations, ce qui garantit la stabilité conjoncturelle. Dans un contexte de mondialisation, de complexité et de surprises, l’approche des anticipations rationnelles semble bien binaire et peu réaliste.[[Voir également https://theoreco.com/entreprise-microeconomie-marketing/mai-ou-est-passe-la-loi-de-loffre-et-la-demande-846.html]]. Ceci remet en cause l’alternative entre anticipations rationnelles et anticipations adaptatives. Dans l’entreprise, on mémorise régulièrement les écarts entre les anticipations et les résultats effectifs, ce qui a pour effet de corriger la manière et la méthode d’effectuer les prévisions suivantes (niveau de réflexion, temps passé, ouverture vers de nouvelles hypothèses, approche probabiliste ou pas, prise de conscience de l’épaisseur du trait, …).

Par rapport à l’Efficacité Marginale du Capital keynésienne

Par rapport à l’EMC keynésienne, les business plans d’investissements futurs intègrent la rentabilité de l’investissement incrémental et non pas celle du stock de capital total. Par ailleurs, l’influence du taux d’intérêt en tant que coût interne du futur investissement s’avère être très faible en raison des nouvelles compositions des investissement qui intègrent beaucoup de prestations de service réparties dans le temps. La comparaison avec les taux d’intérêts liés à, des investissements financiers est rarement envisagée car les OTM (Objectifs de Taux de Marge) retenus dans les business plans sont largement plus élevés.
De ce qui précède on peut conclure qu’il y a un affaiblissement des anciennes théories qui utilisent les anticipations rationnelles des agents économiques. On devrait alors rechercher d’autres formalisations de variations de l’activité économique dans le temps. On pourrait par exemple imaginer que la vision entrepreneuriale de l’économie fonctionne comme une autoroute comportant plusieurs voies. Un véhicule est une entreprise qui vise à livrer le plus vite possible le plus grand nombre de ses produits. La distance entre les véhicules circulants correspond aux positionnements des fonctionnalités entre produits et services. Il y a alors une tendance à ce que les véhicules, c’est-à-dire les entreprises, roulant dans une voie lente rejoignent une voie plus rapide entre deux autres véhicules ce qui diminue la distance entre eux. Avec le temps toutes les distances entre les véhicules se réduisent. Puis il peut se produire un évènement qui se traduit par des coups de freins et un ralentissement sur une grande longueur de la voie, c’est le bouchon. On est alors dans la situation d’offre globale excédentaire, avec ralentissement de la production et un redémarrage qui ne se fait que très lentement car les véhiculent ne peuvent pas accélérer et rouler très vite sans augmenter leur distance, c’est la même chose pour les entreprises.

 

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