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Crédit Suisse .3. Un pamphlet anticapitaliste ?

par Bernard Zimmern
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Le plus surprenant dans la lecture du rapport du Crédit Suisse 2014 sur les patrimoines est de tomber sur la page 114 où la déclaration du paragraphe 4.1 pourrait figurer dans les meilleurs manuels de l’extrême gauche :

« …. Dans presque tous les pays, la fortune moyenne du décile supérieur (c’est-à-dire les 10% des adultes les plus riches) est plus de dix fois la fortune médiane. Pour le centile supérieur (c’est-à-dire le 1% le plus riche), la fortune moyenne excède 100 fois la fortune médiane dans beaucoup de pays et peut approcher 1.000 fois la médiane dans les pays les plus inégalitaires. Cela a été le cas dans la plus grande part de l’histoire humaine, avec la propriété d’une fortune représentée souvent par des terres, et la richesse plus souvent acquise à travers des héritages ou des conquêtes plutôt que par talent ou dur travail… ».

Cette déclaration est d’autant plus inquiétante qu’elle débouche plus tard sur des recommandations (par exemple, page 121 : « Similarly, while progressive income and capital taxes are likely to lower wealth inequality, flatter tax structures will lead to rising inequality[[De même, tandis que des taxes à taux progressif sur le revenu et des taxes sur le capital sont susceptibles de diminuer les inégalités de patrimoine, des structures d’impôt moins progressif conduiront à des inégalités croissantes.]]»), qui se rapprochent fortement de celles de Piketty : augmenter les impôts sur les plus riches et notamment l’ISF.

On est surpris d’une telle orientation. Les autres publications (Capgemini, Boston Consulting Group) tournent leurs études vers des aspects plus constructifs et intéressants, comme les riches, moteurs du changement social, le rôle du numérique dans la gestion du patrimoine ou le rôle des grandes villes dans l’évolution de la richesse.
Alors que la seule conclusion sur laquelle l’étude semble déboucher est l’indignation devant tant d’inégalités et une suggestion, à mots couverts (car nous sommes dans une publication pour personnes fortunées), que les gouvernements doivent combattre les inégalités en accroissant les impôts, en généralisant même l’ISF comme le recommande T. Piketty.

La déclaration citée en tête de cet article pourrait se comprendre venant de novices dans l’étude de la répartition des patrimoines, mais pas d’une banque qui confie ses recherches à un économiste connu ; un indice porte son nom, indice souvent utilisé à la place du Gini.
Ils devraient savoir que les inégalités qu’ils dénoncent sont au moins dix fois plus faibles ; car, comme nous l’avons déjà rappelé dans l’article précédent, une très grande part des plus pauvres est constituée des jeunes en début de carrière alors que les plus riches sont autour de la soixantaine ; et leur fortune est le résultat de l’accumulation de toute une vie.
Les jeunes sont pauvres mais ont toute leur force et un ou une petite amie, les vieux sont beaucoup plus riches, mais avec une force de travail qui chute et des dépenses médicales qui enflent.
C’est l’effet âge bien connu des économistes et qui fait qu’entre la fortune moyenne d’un individu entre 20 et 30 ans et celle d’un individu entre 60 et 70, il y a un coefficient en moyenne autour de 10 ; l’écart de fortune entre le1% et la médiane n’est déjà plus de 100 mais de 10. Et ceci lorsqu’on n’inclut pas dans le patrimoine des plus pauvres le « patrimoine donné », c’est-à-dire tous les bénéfices sociaux construits par les états développés précisément pour réduire les inégalités, mais qui sont en passe, par leur démesure, de détruire la croissance du patrimoine gagné qui est le seul mesuré par le Crédit Suisse.

Le positionnement pris par le Crédit Suisse est d’autant plus insoutenable que, s’il y a eu dans l’histoire des patrimoine acquis à travers des razzias (Gengis Khan, les Vikings, etc.) ou par les héritages dans l’Europe médiévale, l’économie du monde moderne est la démonstration que les riches le sont parce qu’ils ont créé des entreprises et que, quand il n’y a pas de riches, il n’y a pas d’entreprises ou pas assez, mais aussi pas de travail ni d’emplois ; toute la population en souffre.

Ceci est particulièrement vrai en Suisse, un des pays les plus riches de la planète par habitant, d’après les statistiques mêmes du Crédit Suisse. À son développement sont associés non seulement des noms du passé (Sulzer, BrownBoveri, Sandoz, etc.) mais aussi des succès récents et une industrie vibrante qui est au cœur du succès d’universités comme le Polytechnicum de Lausanne.

Il faudrait qu’au moins ceux qui sont censés aider à créer de la richesse – une banque – prennent conscience que cette richesse n’est pas apportée toute seule par les cigognes et que les riches sont à presque 100% des entrepreneurs ou des enfants d’entrepreneurs qui ont réussi en innovant et en prenant des risques (90% aux USA si l‘on prend les listes de Forbes).

C’est bien de se faire de la publicité par des études et de financer des recherches en économie mais –prochain article – il y a des chausse-trappes à éviter.

 

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