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Compétitivité française : cherchez la différence !

par Gérard Laloi
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Peut-être par son histoire, par sa culture, notre pays doute de sa compétitivité, quand il n’en remet pas en cause le concept même. Il suffit de lire ou d’entendre les titres de presse, de colloques : « Le made in France peine à émerger », « Coup de blues chez les industriels », etc.

Le discours d’accueil d’une promotion d’une Grande École de management prononcé par un chef d’entreprise dans les années 60 résonne aujourd’hui, plus de 50 ans après, avec une justesse de grande actualité : « Futurs entrepreneurs que vous êtes, fortifiez tout au long de votre vie votre esprit de compétition, c’est-à-dire votre faculté de différenciation ! Sachez ainsi vous fixer un objectif, vous définir une stratégie, vous forger une conviction ! »

D’où vient alors que ce doute demeure si longtemps après ? Le syndrome du bas prix

Trop souvent, la notion de compétitivité se concentre sur la seule quête du coût le plus bas, démarche certes nécessaire mais, souvent insuffisante pour atteindre au succès. Trop rarement, la recherche assidue des attentes du client, c’est-à-dire du marché, se concrétise par une offre adaptée et surtout spécifique (cf. différenciation) et perçue comme telle. Trop longtemps, la culture « publique » française, politique, syndicale, scolaire, universitaire…, à freiné le besoin d’agilité de l’entrepreneur plutôt que stimulé son ambition.

L’entreprise et les contraintes de coûts, l’autre solution : la différenciation

Longtemps dans notre pays, les prix de revient subirent, et éprouvent encore, à la fois la lourdeur de structures industrielles historiques « ankylosées » et le poids politique du « fameux » modèle social français, certes envié, mais pressurant nos entreprises jusqu’à l’asphyxie. Force est pourtant
de reconnaître que, bousculés par une concurrence mondialisée, les entrepreneurs, depuis longtemps déjà, et les pouvoirs publics plus récemment, ont ouvert et réussi d’importants chantiers d’amélioration. De lourdes restructurations industrielles ont ainsi modernisé nos outils de production : sidérurgie, aciéries, construction automobile… Des mesures de diminution de charges fiscales et sociales, déjà anciennes pour certaines – suppression de la taxe professionnelle, création du crédit impôt recherche – plus récentes pour d’autres, – CICE – contribuent à alléger les prix de revient.

Les premiers effets commencent à se faire ressentir : le coût horaire dans la construction automobile s’avère désormais plus faible en France qu’en Allemagne. Il en serait de même dans le domaine des services.
Pourtant, l’entreprise France, certes lourd paquebot à relancer, peine toujours à se développer et souffre encore d’un rythme de croissance inférieur à ses principaux partenaires. La part des exportations françaises dans le commerce mondial, 3,7%, subit un recul constant, encore aujourd’hui.

L’entreprise et les attentes du marché : le rapport qualité/prix

Le coût, en tant que tel, demeure un critère nécessaire mais insuffisant. Chaque chef d’entreprise le sait, le vit. Seul le rapport qualité/prix perçu par le client compte : rechercher les besoins de son consommateur, viser à accroître son adhésion, en un mot répondre à ses attentes et /ou les anticiper, tel est le vrai et unique défi de la compétitivité de l’offre.
Examiner et contrôler la composition des coûts reste indispensable. Se consacrer à l’analyse de son marché et de ses concurrents constitue l’enjeu prioritaire. Comprendre son donneur d’ordre, développer sa propre sensibilité à son égard, doivent stimuler la créativité dévolue à l’innovation, à la communication, à la coopération. Chercher à paraître unique dans son offre constitue la clé de la compétitivité par différenciation. Une telle philosophie génère le succès d’entrepreneurs privés : celui de start-up en gestation (marché des drones, de la location de voitures de particulier à particulier…) ou confirmées en puissants groupes mondiaux (GAFA), celui d’activités plus traditionnelles (l’automobile allemande, le luxe et les vins spiritueux français…)
Une telle attitude peut conduire à des réussites de secteurs entiers pourtant très concurrentiels et d’acteurs apparemment peu aptes à la compétition : se fondant non seulement sur une garantie de rendement industriel, mais aussi et surtout sur une expertise reconnue unique au monde en matière de sécurité alimentaire, la filière brassicole française a acquis une réputation planétaire porteuse de résultats inespérés. Grâce à cette notoriété spécifique, les céréaliers de France sont devenus les deuxièmes exportateurs mondiaux d’orge de brasserie, les malteurs français sont les premiers producteurs au monde alors que le marché hexagonal de la bière peine à représenter 1% du marché mondial ! Même situation pour le cognac ou l’eau minérale, sans parler d’Airbus ou de Thales.
Enfin, une telle vision peut susciter, à l’initiative d’élus politiques, de véritables performances économiques, sources de dynamisme dans les territoires : création du Futuroscope de Poitiers sous l’impulsion de René Maunoury, président du conseil départemental de la Vienne.
La compétitivité de l’offre répond donc plus à une appréhension globale de la demande, stimulée par une volonté inébranlable de différenciation et d’unicité.

L’entreprise étrangère à la culture française

Le climat ambiant à l’égard de l’idée même d’entreprise et du concept de compétition que son développement, voire sa survie, exige, révéla longtemps une culture française pour le moins réservée sinon sceptique face au monde commercial et au sens de la concurrence qu’il suggère.
Mais, politique nouvelle bienvenue, nos gouvernants s’efforcent aujourd’hui non seulement de signifier aux citoyens le rôle majeur de l’entreprise compétitive, mais aussi de stimuler son dirigeant. La prise de conscience de la responsabilité des entrepreneurs dans la création d’emplois dits marchands, vocabulaire récent, génère chez les pouvoirs publics un virage quasi idéologique en faveur des sociétés, soudain dignes d’être soutenues dans leur univers de compétition et pas seulement dans les périodes de crise.
Sachons reconnaître les avancées en ce sens, traduites par des allègements de charges, l’évolution du code du travail, l’accès à l’apprentissage…
Cependant, toute modification de culture implique un processus lent et long, réclame une transformation profonde et des attitudes nouvelles. Faire comprendre la compétitivité, en rendre attractives les opportunités, en exprimer les risques et les assurances correspondantes, doivent nourrir l’ambition des acteurs, potentiels moteurs de ce changement.

Un contexte global à faire évoluer : de l’enseignement aux syndicats en passant par l’administration

L’éducation nationale, dès le primaire ou au moins au niveau des collèges et lycées, doit contribuer à l’enseignement, non seulement du fonctionnement, mais aussi et surtout de la philosophie de l’entreprise. L’enseignement supérieur dans ses universités tournées vers l’économie et la gestion doit accompagner ce mouvement déjà bien enclenché par les écoles de management : 5 d’entre elles, c’est une satisfaction et un honneur pour la France, sont classées dans le top 10 mondial selon le Financial Time!

L’administration doit participer de cette culture d’entrepreneur, en comprendre les enjeux, les motivations, les doutes : contrôler c’est bien, faciliter c’est mieux, mettre en place le CICE c’est intéressant, imaginer une remise en cause de la fiscalité sur les brevets c’est stressant !
Dans ce domaine, peut-on développer un processus qui semble prospérer : les allers et retours de cadres entre la fonction publique et l’entreprise ? Peut-on, à cet égard, bannir du vocabulaire un terme peu valorisant, en tout cas peu compatible avec le concept de compétitivité : le « pantouflage » désignant le passage d’un haut fonctionnaire dans le privé ? A organiser dans les deux sens.
Le monde syndical également, par exemple par son intérêt pour le développement de systèmes d’intéressement des salariés au résultat des sociétés, par sa contribution vigilante et ouverte au besoin de formation, doit faciliter avec davantage de sérénité ce vécu des contraintes et des opportunités de la compétitivité.
Le chef d’entreprise enfin, par sa propre attitude et son comportement d’abord, par son action pédagogique auprès des différents corps mentionnés ci-dessus ensuite, reste l’acteur majeur, vecteur de ce souffle, de cette philosophie de l’action, de cette envie de gagner !

La compétitivité, loin de se résumer à une nécessaire gestion rigoureuse des coûts, participe en fait d’un état d’esprit : rayonnement porteur d’une volonté de différenciation et de spécificité à offrir à son client, à son marché : le maitre du succès de l’entreprise.

Puissent les forces motrices de notre pays, les gouvernants et les élus, l’administration, le monde enseignant, les organisations syndicales, additionner leurs forces au service de cette vision. La France y gagnera en compétitivité, et le chef d’entreprise en ambition.

 

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1 commenter

zelectron octobre 7, 2018 - 8:21 pm

A croire que c’est la bonne explication . . .
La castration des entreprises particulièrement des PME/PMI/ETI fait la jouissance de Bercy.

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